
Entretien avec Amélie Cartoux, Domaine de Montvac
- Aurore
- 21 oct.
- 5 min de lecture
Un domaine écrit au féminin pluriel et des vins en toute délicatesse sur des terroirs traditionnellement puissants et solaires ? Bienvenue au domaine de Montvac ! Amélie Cartoux est la fille de Cécile Dusserre (domaine de Montvac) et de Philippe Cartoux (domaine des Espiers), et surtout un vrai électron libre entre les deux domaines familiaux. Mais c’est bien au domaine de Montvac et ses 23 ha, qu’elle passe la plupart de son temps, s’apprêtant d’ailleurs à être la 6e génération de femmes à la tête du domaine (et ce, depuis 1865 !). Cultivées intégralement en agriculture biologique, chaque parcelle (toutes situées sur Vacqueyras et Gigondas) demande une attention et observation toute particulière au quotidien.
Rencontre exclusive avec la vigneronne lors de Rhône en Seine (le 17/11 au Georges V - Hôtel Four Seasons)
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Qu'est-ce qui t'a conduit à la viti/viniculture ?
On va dire que j’ai un parcours assez atypique dans le monde vigneron : j’ai commencé par un bac ES (économique et social), spécialité économie. À l’époque (c’est encore le cas aujourd’hui), j’étais passionnée d’équitation, et je me voyais bien en faire mon métier. Je me suis donc tournée vers un BTS NRC (Négociation et Relation Client) pour pouvoir avoir le temps de continuer à monter à cheval et faire de la compétition en parallèle de mes études. Et puis, j’ai dû faire un stage de fin de parcours, et il y a eu le COVID, donc le choix de faire mon stage ici au sein du domaine familial (sur la partie commerciale) s’est vite posé comme une évidence.
Si nos parents ont toujours été très cools à ce sujet et ne nous ont jamais poussées avec mes sœurs à reprendre la suite, j’étais un peu une « Obélix du vin ». Je suis tombée dans la marmite toute jeune, et la passion est venue progressivement… mais sûrement. C’est pour ça qu’aujourd’hui je ne me vois pas quitter ces vignes et cette cave. J'aime énormément ce que transmet le vin dans le ressenti, dans les émotions qu'il peut procurer. Après, il faut admettre que ce n’est pas facile tous les jours… surtout quand on est une fille dans un milieu encore dominé par les hommes, mais mes parents savent bien m’aider quand j’en ai besoin, donc ça va !
Qu'est-ce que tu dirais à la toi d’il y a 10 ans ?
Il y a 10 ans, je rêvais de finir cavalière
professionnelle… comme toute cavalière. Mais en étant plus réaliste, je me suis dit que suivre les traces familiales n’était pas une mauvaise idée non plus. La culture française reste centrée autour de la gastronomie et du vin, et c'est ce qui m'a toujours été transmis par mes parents.
Donc : « Suis ton ressenti et cet amour de la gastronomie, du vin, et tu feras de belles choses. »
Quel est ton premier et/ou plus marquant souvenir de vin ?
Mon plus grand souvenir de vin reste quand j'ai réalisé ma première cuvée en 2021 : c’était Prélude du Domaine de Montvac. J’avais carte blanche sur tout le process, des vignes à la mise en bouteille !
Côté dégustation, mon plus grand souvenir - peut-être que je dirais le même qu’Hugo (Fischer, du Château Revelette) parce que c'était avec Rhône Vignobles dont ils font aussi partie - était lors d’une dégustation à Beaurenard où on a eu la chance de déguster un Rayas 1919.
Qu'est-ce que tu voudrais qu'on dise de tes vins ?
Que c'est des vins qui transmettent à la fois une passion, un savoir-faire et un terroir. Parce que si tu n'arrives pas à comprendre puis saisir la subtilité de ton terroir, tu n'arriveras pas à l'équilibre dans tes vigne. Et au final, tu n'arriveras pas à en sortir le meilleur vin.
Si tu devais vinifier un autre terroir ou cépage, lequel ce serait et pourquoi ?
Malheureusement, je n'ai pas eu la chance de faire de vinifications à l'étranger parce que c'était en plein COVID. Mais je pense que j’aimerais bien travailler un grenache en Espagne par exemple. Ce serait super intéressant de comparer un cépage que je connais dans un autre environnement, et puis je ne maîtrise pas très bien l’espagnol on va dire, donc ça serait un beau (double) challenge !
Que retiens-tu de ta formation ?
Et bien, surtout la partie commerciale en ce qui me concerne ! Et en ce moment, je suis en train de passer un diplôme de gestion d’un domaine viticole. En fait, ce qui est peut-être le plus compliqué, c’est que pour gagner en légitimité dans ce milieu, il faut montrer qu’on est capable de tout comprendre et de tout maîtriser, depuis les vignes (y compris la partie tracteur, où je m’améliore d’année en année !) à la commercialisation en passant par la mise en bouteille. Il faut être un vrai couteau suisse !
Le reste, la sensibilité aux vignes pour capter la justesse du terroir, les fines subtilités entre les différentes parcelles… c’est essentiellement de l’observation sur le temps long au domaine. Je compte énormément sur le ressenti visuel et gustatif, sur la transmission… bref, des choses qu’on n’apprend pas à l’école. Et puis, de toutes façons, ni moi ni mes parents n’avons jamais été très scolaires, c’est en faisant qu’on apprend !
Comment épouse-t-on au mieux la nature selon toi ?
Déjà, en la regardant avec patience. Parce que ce n'est pas du jour au lendemain que tu auras des résultats. Et puis, il faut se fier à son ressenti sur cette base d’observation. Je pense que si tu ne connais pas un minimum le terroir, tu n'arriveras pas à déceler toutes les petites étincelles que le vin peut transmettre.
Ensuite, en essayant de mettre toutes les chances de son côté pour qu'elle nous transmette le meilleur. Autrement dit, lui donner tous les apports nécessaires et la travailler de sorte que la vigne soit la plus belle possible, pour avoir les meilleurs vins à la fin.
Pour finir, est-ce qu'il y a une rencontre qui aurait changé ta manière de voir les choses ?
Sans hésiter : toutes mes rencontres et apprentissages via Rhône Vignobles. Échanger avec d’autres vignerons et vigneronnes, apprendre de leurs expériences, de leurs conseils… Grâce à eux, j’ai réussi à comprendre mon métier de manière globale. Et prendre deux-trois petits conseils ici et là !
Et puis, on a aussi pu faire des visites et dégustations vraiment incroyables. Que ce soit en France ou à l’étranger, ça forge l’ouverture d’esprit, la remise en question et on peut s’inspirer de pratiques vues ailleurs... Ou espérer produire des vins aussi magiques que certains qu’on a eu la chance de goûter !










