
Entretien avec Paul Garcin, Château Haut-Bergey
- Aurore
- il y a 1 jour
- 4 min de lecture
Vous vous demandez encore quel Bordeaux ouvrir pour Noël ? Comment faire découvrir de nouvelles approches plus sensibles sans bousculer les habitudes de la table ?
Le Château Haut-Bergey se situe au coeur de l’appellation Pessac-Léognan, à Bordeaux (rive gauche). Entre rupture et commencement, Paul Garcin a repris les rênes du domaine familial en y insufflant un souffle de liberté et des convictions fortes, en cohérence avec la nature. Passé en biodynamie et à des vinifications naturelles, le Château fait figure d’exception dans le paysage bordelais d’hier et aujourd’hui. Un vrai coup de coeur de l’équipe depuis plusieurs années, que nous vous proposons de découvrir aujourd’hui.
Pour connaître les tarifs et disponibilités en Île-de-France, contactez-nous à contact@vinhop.com.
Comment es-tu arrivé à la viti-viniculture ?
Pas du tout suite, ni grâce à mon parcours ou à ma formation : au début, je jouais dans un groupe de rock, on avait signé chez Sony à l’époque (Ginger Frolic) ! Et puis, avec l’évolution de la vie, je suis revenu à mes racines, au berceau familial bordelais. Ma famille y possédait un domaine depuis plusieurs décennies (dans le village de Léognan), dirigé jusqu’alors par ma mère.
J’y suis arrivé par le spectre de la culture et de la transmission donc, et j’y ai amené (avec le soutien maternel surtout) ce côté « libre » que j'ai acquis avec le temps, et une sensibilité toute particulière à l'écologie.
Il y avait bien sûr la peur et la pression liées au diktat de l’époque - très fort dans le Bordeaux des années 1990, entre le goût parkerisé des consommateurs, les dérives de l'oenologie moderne, de la science phyto-pharmaceutique… Comme le dit l’adage, « on ne change pas une équipe qui gagne ». Le système fonctionnait, alors pourquoi changer ? Je ne voulais pas ça plus jeune. Mais quand on grandit, qu’on fonde une famille, on a besoin de se sédentariser. Et puis après, ce qui m'a définitivement ramené au vin… c’est le vin ! Les dégustations, les rencontres, le plaisir et les questionnements que ça suscitait… Et puis, même si mon entourage était au début un peu inquiet du virage que je voulais prendre, la vérité est dans le verre ! J’ai testé sur une seule cuvée au début : c’était bon et les ventes suivaient, ça a rassuré tout le monde assez naturellement.
Qu’est-ce que tu dirais au toi d’il y a 10 ans ?
Si je pouvais me donner un conseil, je me dirais « Ne perds pas de temps, change tout, tout de suite ». Tu es sur la bonne voie, mais tout prend du temps. N’en perd pas ! Je doutais beaucoup… On doute toujours ! J’avais très (-trop !- de l’avis de Richard Leroy aha) peur de certains changements. Certains choix que je fais aujourd’hui (cette année même !), j'aurais dû les faire il y a 10 ans… Ça m’aurait fait gagner un temps précieux, économiser beaucoup de choses et progresser encore plus.
Quel est votre premier et/ou plus marquant souvenir de vin ?
Il y en a un qui reste en mémoire et qui résonnera peut-être plus encore aujourd’hui malheureusement… Avoir eu la chance de goûter les vins de la famille Reynaud, et notamment Château Rayas 1996. Je dois remercier mes parents, allocataires depuis des décennies, qui ont permis ce moment et cet apprentissage. Ils m’ont fait découvrir des grands vins fins, avec un vrai parti pris.
Que retiens-tu de ta formation ?
Comme je le disais, je ne me suis pas formé académiquement au vin (à part une spécialité biologie au bac…). Ma « formation » réside surtout dans les rencontres que j’ai pu faire. Ma chance a été de parcourir la France entière, de découvrir et de rencontrer beaucoup de vignerons. C’est comme ça que j’ai appris le vin, et forgé mes convictions. Et je me suis aperçu d’une forme de logique et de cohérence dans tout le process, des vignes jusqu’au commerce. En d’autres termes, plus tu as une certaine vision du terroir, plus l'idée de la distribution se fait précise (beaucoup de ces vignerons travaillent avec VINHOP, entre autres).
Comment épouse-t-on au mieux la nature ?
En réalité, c’est le goût du premier fruit cultivé en biodynamie que j’ai ramassé sur mon domaine qui m’a fait prendre confiance en elle. La nature s’est révélée à moi à travers un seul de ses fruits, et j’ai compris la valeur des efforts d’une année. On comprend alors un peu comme une révélation que ce ce qu’on lui donne elle nous le rend.
Pour finir, y a-t-il eu une rencontre qui a changé ta manière de voir les choses ?
Des très grands vignerons, très précis, très engagés. Je vais prendre le domaine de Fosse-Sèche, qui est un domaine très inspirant pour moi. Je pense aussi bien sûr à Richard Leroy et ses critiques honnêtes, Jean-Charles Abbatucci et son amour de la finesse… Tous ces domaines ont été très inspirants ; et aux antipodes de ce qu'on m'avait appris.
Ce que tous ces grands font n’est pas forcément reproductible chez moi. Mais leur regard curieux et innovant m’a appris à regarder mon travail en changeant de paradigme.










